Quelle idiotie. Se perdre dans un dédale de cailloux et de bois. Les chiens n'ont pas d'esprit. Ils semblent n'être rien de plus que des proies, si ? Après tout, il suffit de sentir d'où vient ce vent sifflant et froid, d'écouter les hurlements d'autres animaux pour sortir de ce qu'ils appellent le labyrinthe. Ha, ha. Titre bien ennuyeux. Ce n'est pas forcément le sens de l'orientation, c'est tout simplement le bon sens. Mais tous ces animaux qui vivent avec leurs yeux, pour leurs yeux, l'ont oublié. Ils ne croient qu'en leur absurde vue, ils pensent même que leur bonheur lui est lié ! Voir le beau, aimer le beau... Ils devraient savoir, ils pourraient comprendre, s'ils étaient moins obstinés, savoir que de toute façon tout est déjà écrit et qu'ils ne trouveront pas le bonheur s'ils n'y sont prédestinés.
Vibration.
Quelqu'un approche. Le long loup famélique frisonne, et se met dans le sens du vent pour ne pas être repéré. C'est un jeune chien. Perdu. Une proie facile. Une sorte de sourire sinistre se dessine sur les lèvres du loup, mais s'estompe bien vite. Les vibrations des pas du chien alourdissent l'atmosphère.
Uwë bondit. Ventre sur échine, un bref claquement de crocs dans le vide, une proie immobilisée, apeurée, maintenue par le garrot. Les yeux du chien roulent dans leurs orbites, il sent instinctivement la nature de l'être sur son dos. Le voleur d'âme tente de s'avancer lentement vers la tête de sa proie, sans lâcher sa prise sur le garrot, puis sur la nuque. Soudain, vif comme l'éclair, il sectionne l'un des tendons de la patte avant droite, et reprend sa position. Le chien hurle, se débat, mais il est maintenu. Le sang jaillit de la plaie ouverte à son coude, et l'animal comprend. Une seconde après, son autre patte avant est mutilée, et le voleur se place face à sa proie, qui continue d'essayer de mordre tout en reculant sur ses pattes arrières, pitoyablement.
Une longue gueule béante s'ouvre. Le chien résiste, mais le voleur d'âme force.
Et mange. Laissant un carcasse encore chaude derrière lui, il continue son errance.